Gérer les espèces envahissantes à Hawaiʻi

Hawaiʻi est la capitale mondiale des espèces menacées, du fait notamment de l’introduction d’espèces exotiques envahissantes. L’adoption de nouvelles approches permettra-t-elle de lutter contre ce fléau ? 

The effect of biocontrol on strawberry guava Photo: Forest and Kim Starr - (CC BY 2.0)

Pour les millions de touristes qui s’y rendent chaque année, Hawai’i est l’état « Aloha » ou simplement le paradis sur Terre. Cependant, pour les conservationnistes, c’est la capitale mondiale des espèces menacées. Comme de nombreuses autres îles dans le monde, les invasions biologiques sont l’une des principales menaces à la biodiversité riche et unique d’Hawai’i.

Une espèce exotique est une espèce introduite par les humains hors de son aire de répartition naturelle, et celle qui s’étend et impacte négativement la diversité biologique native est appelée « envahissante ». À Hawai’i, plus de 5000 espèces exotiques ont été introduites. Seulement quelques-unes sont devenues envahissantes, mais elles ont des conséquences négatives très importantes, notamment la dégradation significative de certains habitats et l’extinction de certaines espèces.

Le sanglier – un croisement de cochon domestique originaire de Polynésie et d’Europe – et le goyavier-fraise – un arbre fruitier originaire du Brésil – sont parmi les espèces exotiques envahissantes les plus destructives à Hawai’i.

Les effets des sangliers sur les écosystèmes hawai’iens sont très importants et se répercutent à plusieurs niveaux écologiques. Par exemple, les sangliers se nourrissent fréquemment de fougères arborescentes, qui sont un groupe dominant dans les forêts natives d’Hawai’i. Cela tue les fougères, ce qui cause des changements dramatiques dans la structure et les fonctions écosystémiques des forêts. De même, lorsque les sangliers creusent le sol à la recherche de nourriture, ils perturbent le sol, tuent les plantes et facilitent l’invasion d’espèces végétales non-natives. Enfin, les sangliers participent également à la diffusion des plantes envahissantes par leurs excréments, qui dispersent les graines.

Une plante envahissante en particulier, le goyavier-fraise, semble liée à un cercle particulièrement vicieux avec les sangliers. Les sangliers apprécient particulièrement les fruits de cet arbre et dispersent leurs graines dans les forêts natives. Le goyavier-fraise, comme les sangliers, est maintenant fréquent dans la plupart des principales îles d’Hawai’i, et forme des bosquets denses, étouffant les espèces natives et détruisant les habitats des oiseaux et insectes natifs.

Les biologistes sur le terrain s’appuient sur la coupe manuelle et l’application d’herbicides pour contrôler le goyavier-fraise, ainsi que pour piéger et chasser les sangliers. Ces méthodes sont chères et gourmandes en main d’œuvre, et inefficaces pour lutter efficacement à grande échelle contre les impacts de ces espèces. Cependant, des recherches et des évaluations significatives des risques ont permis de mettre à jour un agent de lutte biologique prometteur pour le goyavier-fraise : le tectococcus ovatus, un insecte brésilien, se nourrit exclusivement de goyavier-fraise et pourrait donc réduire la croissance et la production de graines de cette espèce envahissante. Pour les sangliers, une méthode améliorée et plus sûre pour les appâter est actuellement testée. Des engins volants sans pilotes sont également testés pour aider à la surveillance des espèces envahissantes, ce qui pourrait aider à renseigner et à prioriser les actions sur le terrain.

Près de 30 événements du Forum lors du Congrès mondial de la nature de l’UICN 2016 seront axés sur la prévention, le contrôle et l’éradication des espèces exotiques envahissantes et leurs impacts, certaines se focalisant exclusivement sur les îles. Ces événements diffuseront les connaissances et les bonnes pratiques. Les participants sont encouragés à élaborer des orientations stratégiques pour lutter contre les invasions biologiques. 

- Reese Brand Phillips, Service américain à la Vie sauvage et aux Poissons, Bureau Vie sauvage et Poissons des îles du Pacifique

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